Au Togo, le riz occupe une place croissante dans l’alimentation des populations et représente un enjeu stratégique pour la sécurité alimentaire nationale. Malgré un potentiel agroécologique favorable et une forte demande locale, les rendements rizicoles restent globalement faibles. Cette situation s’explique en grande partie par deux contraintes majeures : l’insuffisante maîtrise de l’aménagement des sols notamment en zones de bas-fonds et périmètres irrigués et la difficulté d’accès à des intrants de qualité (semences certifiées et fertilisants). Ces facteurs limitent considérablement la productivité des producteurs, réduisent la rentabilité des exploitations et freinent l’émergence de cette chaîne de valeur. Face à ces défis, repenser les politiques d’aménagement agricole et renforcer les mécanismes de distribution d’intrants agricoles climato-intelligents apparaissent comme des leviers essentiels pour dynamiser durablement la filière riz au Togo.
Pour inverser la tendance et dans le cadre de ses multiples appuis à la chaine de valeur riz, le FSRP Togo a non seulement acquis et distribué des intrants (semences améliorées et fertilisants) mais aussi, renforcé la capacité des riziculteurs sur les techniques d’aménagement sommaire des bas-fonds tout en les équipant en matériels intelligents de labour (motoculteurs).
Quand le FSRP dynamise la filière riz au Togo
En combinant investissements matériels et accompagnement institutionnel, le FSRP Togo contribue à faire de la filière riz un véritable levier de croissance rurale. Grâce à la distribution en crédit intrant à ce jour de 342,54tonnes de semences certifiées de riz et 2 569,05 tonnes d’engrais (NPK 15 15 15 et Urée) remboursable en nature au profit de 34 254 riziculteurs dont 21 717 femmes soit 63,40%, les retombées positives commencent à se faire sentir. On note principalement une augmentation des rendements moyens de 5 à 8 % à l’hectare et l’amélioration des revenus des producteurs d’environ 16%. Ces résultats encourageants sont le fruit des mécanismes mis en place non seulement pour améliorer l’accès des producteurs aux intrants agricoles mais aussi pour faciliter le suivi de la production, la collecte du riz paddy à la récolte ainsi que la commercialisation des surplus de production par les producteurs. C’est dans cette optique que des conventions de partenariat ont été signées avec certaines rizeries du Togo à l’instar de la rizerie de Tône dans la région des savanes qui est passée, grâce à cette convention, d’un stock de 800 tonnes en 2020 à 2000 tonnes en 2024, avec un nombre de producteurs agrégés qui est passé de 1700 à 16 800 grâce aux appuis du FSRP.
Afin de professionnaliser les pratiques agricoles et promouvoir les approches de la gestion durable des terres (GDT), 640 riziculteurs dont 59 femmes ont été renforcés sur les techniques d’aménagement sommaire des bas-fonds rizicoles : Smart Valleys, une approche peu coûteuse et participative qui vise à améliorer la rétention et la gestion de l’eau de pluie pour augmenter les rendements et la résilience des cultures face aux changements climatiques. Dans une logique de facilitation des travaux aux producteurs formés, le FSRP a mis à leur disposition, des kits de travail pour la réalisation des schémas et l’aménagement des parcelles.
L’essor des acteurs d’une filière stratégique
À la base de la filière, les riziculteurs jouent un rôle fondamental. Grâce à l’accompagnement technique croissant, aux formations en bonnes pratiques agricoles, et à l’introduction de semences certifiées à haut rendement, ces producteurs enregistrent une nette amélioration de leurs performances comme en témoigne cette bénéficiaire : « Je suis SOWARE Amina. J’ai bénéficié du projet FSRP, d’un sac et demi d’engrais et de 10 kg de semences de riz que j’ai cultivé sur 0.25 hectare. Personnellement je récoltais au plus 5 sacs de riz paddy sur 0.25 hectare. Mais avec les semences que le projet m’a données, j’ai récolté cette année 9 sacs de 100 kilos sur la même superficie. Grâce à cette bonne récolte, j’ai vendu le surplus pour soutenir financièrement la famille et reprendre ma tontine et mon commerce que j’avais laissé faute de moyen. J’ai aussi un stock à la maison pour la consommation de la famille ».
Aussi, au niveau du maillon transformateur, des impacts encourageants sont enregistré comme nous révèle la responsable de la rizerie de Tone en ces termes : « La rizerie Tône avant l’arrivée du FSRP disposait des groupes constitués qui livraient du paddy pour la transformation annuelle. Depuis 2020, avec l’augmentation de la demande du riz local sur le marché national, la rizerie n’arrivait plus à couvrir la demande avec son stock évalué annuellement à 800 tonnes de paddy. D’autres difficultés étaient liées à la limitation du stock constitué entre autres des difficultés de mobilisation du crédit auprès des banques. Aujourd’hui avec l’appui du FSRP, nous avons vu notre zone d’intervention qui se limitait à Barkoissi, couvrir toute la région des savanes et allée jusqu’à Kanté dans la région de la Kara. Nous sommes passés de 1 700 producteurs à 16 800 producteurs agrégés, une augmentation qui a agi considérablement sur la quantité de matières premières à mobiliser qui, elle est passée de 800 tonnes à 2 000 tonnes de paddy. En dehors de ces impacts, nous avons découvert grâce au FSRP, des zones à forte production du riz paddy dont les producteurs seront enrôlés dans la liste de producteurs de la Rizerie de Tone.» , nous a-t-elle confié avant de poursuivre : « quant aux emplois créés, la rizerie est passée de 32 à 73 personnes. Au niveau de la transformation, le nombre d’emploi est passé de 12 à 23 et le nombre de femmes trieuses, de 20 à 50 », conclut-elle.
En agissant sur plusieurs maillons de la chaîne de valeur de l’aménagement des terres agricoles à l’accès aux intrants de qualité, en passant par le renforcement des capacités des acteurs, le FSRP participe activement à la modernisation et à la compétitivité de la filière rizicole togolaise.
Une structuration efficace du commerce au bénéfice des riziculteurs
Le développement de partenariats commerciaux avec des transformateurs et distributeurs permet aux producteurs de mieux valoriser leur production. En structurant les relations entre producteurs et rizeries dans un cadre transparent et équitable, il devient possible d’assurer une meilleure répartition des marges, d’accéder à des canaux de distribution plus stables et rémunérateurs et de dynamiser l’économie locale. Ainsi, sur le volet commercialisation, en plus de la rizerie de Tone, trois autres rizeries ont bénéficié du soutien du FSRP pour la commercialisation des produits. Il s’agit de la rizerie Binah, Notsè et Sotouboua. Des contrats de marchés ont été signés avec les producteurs pour leur garantir l’écoulement de leurs produits. Grace à cet accompagnement, un total de 24 178 producteurs ont pu commercialiser leur production à ce jour.
Par-delà la contractualisation qui sécurise les ventes aux producteurs, les acteurs de la chaîne de valeur du riz ont reçu divers soutiens pour améliorer leur commercialisation dans les chaînes de valeur notamment le renforcement des capacités sur l’accès au marché dans le cadre de la ZLECAf, la formation des femmes et jeunes commerçantes sur le commerce transfrontalier, les procédures douanières et autres exigences réglementaires du Corridor Abidjan-Lagos. Ces acteurs ont été également appuyé dans le cadre de leur participation aux différents marchés, au salon International de l’Agriculture et de l’Agroalimentaire de Lomé (SIALO), et aux différentes foires de promotion des produits locaux pour la promotion du commerce de leurs produits.
Plusieurs autres initiatives ont été soutenues par Le FSRP en partenariat avec le ministère du commerce et la Haute autorité de la qualité et de l’environnement (HAUQE). Il s’agit de l’élaboration du programme de certification de produits agroalimentaires prioritaires togolais dont le riz au profit de la HAUQE pour favoriser l’accompagnement des entreprises, leur compétitivité et l’accès facile des produits aux marchés. Le programme a également appuyé l’élaboration des statistiques du commerce extérieur du Togo sur les produits cibles des marchés UEMOA, CEDEAO, ZLECAF ainsi que l’élaboration du répertoire des exportateurs et potentiels exportateurs des produits agroalimentaires pour la mise en relation avec les acheteurs de l’espace CEDEAO.
Un soutien déterminant du FSRP pour la mise en place de l’Observatoire nationale du riz du Togo (ONR-T)
Le Togo a franchi une nouvelle étape décisive avec la mise en place de la Section nationale de l’Observatoire national du riz en décembre 2024. Une initiative qui s’inscrit dans une dynamique régionale portée par la CEDEAO et qui vise à améliorer la gouvernance, la coordination et le pilotage de la filière riz dans le pays.
Grâce à une collaboration active des structures partenaires et des acteurs de ladite chaine de valeur, la création de cette instance nationale marque un tournant dans la structuration de la filière. L’Observatoire Nationale du Riz du Togo (ONR-T) vise à coordonner les investissements dans le secteur du riz, informer les décisions politiques, collecter des données régulières et communiquer sur le développement de la chaîne de valeur riz. Il a pour objectifs d’assurer le suivi et l’évaluation de la production, transformation et commercialisation du riz au Togo afin d’améliorer ses performances ; de faciliter la coordination entre les acteurs publics, privés et les organisations non gouvernementales pour développer des partenariats et stratégies communes favorisant la structuration de la filière ; promouvoir l’innovation et les technologies modernes pour améliorer la productivité des exploitations rizicoles, entres autres. Quant aux perspectives, elles restent l’opérationnalisation de la section nationale et la mobilisation de ressources pour la mise en œuvre des activités, l’élaboration et l’exécution du plan d’action et du plan de mobilisation des ressources, l’élaboration et la mise en œuvre des grands projets de transformation structurelle de la filière en alignement avec les prescriptions régionales.